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Ressusciter chaque jour à « l’au-delà divin » qui est le cœur de « l’ici-bas »

resucitadoVoici une réflexion de José Arregi. Je la trouve intéressante à partager parce que son discours peut nous déplacer dans notre manière de concevoir la Résurrection du Christ et nous aider à sortir des discours convenus. Il nous propose de chercher un nouveau langage qui peut « parler » à notre monde aujourd’hui, à « lâcher » les paramètres du passé et à ne plus « persister à penser que la foi pascale suppose la croyance littérale en tout cet appareil imaginaire et conceptuel » qui « équivaut à être profondément infidèles au message de la Bible et de l’Évangile ». Et vous qu’en pensez-vous ?


« Je ne fréquente pas les salles de cinéma, et c’est seulement par la presse et quelque bande annonce que j’ai eu connaissance du film « Resucitado », (récemment paru en France sous le titre « La Résurrection du Christ »). Le directeur – qui n’a pas un petit mérite pour avoir seulement osé – revient à l’histoire de Jésus de Nazareth narrée par les Évangiles en se centrant sur la question la plus épineuse : Qu’advint-il de Jésus après sa terrible mort sur la croix ?
Son corps a disparu et dans Jérusalem des rumeurs circulent comme quoi il est revenu à la vie. S’il en était ainsi, il serait le Messie. Pilate, le Procureur romain qui l’avait condamné à la terrible peine de la croix, commence à avoir peur et charge le centurion Clavius de chercher le corps de quelque façon que ce soit, pour faire taire les rumeurs et éviter un possible soulèvement « chrétien » ou « messianique » (qui signifient la même chose) de la part des disciples du prophète nazaréen. Mais le corps n’apparaît pas, et Clavius lui-même commence à douter : serait-il le Messie ?
Il semble que le film réussit à construire une histoire qui captive et soutient l’intérêt du spectateur. Je ne crois pas, cependant, qu’il réussisse à traiter l’évènement de fond, la résurrection, comme l’attend notre époque. Malgré cela, le film, comme le dit « Religion digital », a eu l’assentiment du Vatican et du pape François en personne, et aussi celui de l’archevêque de Madrid, monseigneur Carlos Osero, qui a même posé avec les acteurs.
En tant que le chrétien que je veux être cherchant à dire ma foi de manière crédible, je suis peiné, non par le film – qui sera bon si l’histoire, l’ambiance et les acteurs sont bons, et il paraît qu’ils le sont -, mais de constater à nouveau que l’institution ecclésiale reste ancrée dans des paramètres du passé. Dans des paramètres qui sont devenus totalement étrangers à la majorité de notre société pour ceux qui ont moins de 65 ans. Veulent-ils parler de Dieu, de Jésus, de la Pâque, seulement à des retraités et encore seulement à une petite partie d’entre eux ? Croient-ils réellement que l’Évangile peut être encore levain et souffle pour notre société moderne de la connaissance ? Ou ont-ils complètement renoncé ? Ou pensent-ils qu’ils peuvent continuer à nous parler aujourd’hui avec le langage d’autrefois ? Personne ne les comprend.
L’institution ecclésiale et la théologie officielle – et même ce film – continuent d’enfermer l’annonce pascale, le message de la résurrection, la bonne nouvelle de la Vie dans des images, des concepts, des visions cosmiques du passé : la résurrection comme un acte physique survenu au 3e jour, la disparition miraculeuse du corps, l’apparition également miraculeuse et sélective de Jésus ressuscité seulement à quelques-uns… C’est comme continuer à dire que ce monde merveilleux fut créé en 6 jours, que l’être humain apparut sur notre planète par intervention divine « spéciale » ou que le soleil tourne autour de la lune.
Il est vrai que la Bible et les évangiles le racontent ainsi, mais continuer à lire la Bible et les évangiles de cette manière, à la lettre, et persister à penser que la foi pascale suppose la croyance littérale en tout cet appareil imaginaire et conceptuel équivaut à être profondément infidèles au message de la Bible et de l’Évangile.
La résurrection ne survient pas dans nos paramètres de temps et de lieu. Elle n’est pas temporelle ni intemporelle, mais trans-temporelle. Elle n’est pas spatiale ni a-spatiale, mais trans-spaciale. Elle n’est pas historique, ni anhistorique, mais trans-historique. Nous ne pouvons l’imaginer, parce que nos neurones peuvent seulement imaginer 3 dimensions. Mais la Résurrection ou Dieu ou L’Esprit Vital ne peuvent se laisser enfermer dans nos 3 dimensions ni dans toutes celles que nous pourrions connaître ou manipuler.
Ainsi donc, Jésus ne ressuscita pas « au 3e jour » à Jérusalem, mais chaque jour de sa vie, quand il respirait l’Esprit de la Vie plein de confiance, quand il était le prochain bon et heureux, incitait les pauvres à se libérer de leur misère, s’affrontait au pouvoir politique et religieux, annonçait et réalisait un monde libre et fraternel, racontait des paraboles consolatrices et provocatrices, guérissait les malades et leur disait : « Lève-toi », partageait la table avec les exclus de la société et de la religion… Jésus ressuscita dans sa vie, quand il vivait et faisait vivre. Pour cela il ressuscita aussi sur la croix, quand il rendit totalement son souffle vital.
De même pour nous. Nous ne ressusciterons pas « à la fin du monde », ni dans « la vallée de Josaphat » ou dans « l’autre monde ». Comme Jésus, nous ressuscitons à chaque instant de bonté créative – aussi fragile et fragmentaire soit-elle – de notre vie quotidienne. Nous ressuscitons à la Vie quand nous accueillons les réfugiés – le Vivant se fait présent en eux -, et si nous ne les accueillons pas nous mourons. Nous ressuscitons à la Vie quand nous ressuscitons ceux qui meurent : ceci est entre nos mains. Cela dépend de nous, par exemple, de ressusciter ces enfants – 2 chaque jour – qui se noient dans l’Égée ou la Méditerranée, et il y a plus de 340 garçons et filles noyés dans les 6 derniers mois en Méditerranée, convertie en « la plus grande fosse commune du monde » (Nuria Diaz, porte-parole de la Commission espagnole de l’Aide au réfugié). Comment les ressusciterons-nous ? En recevant en nous, en respirant profondément leur doux et puissant souffle vital, et en le faisant revivre dans tous les enfants menacés de mort. Ressuscite-les et tu seras en train de ressusciter.
Si tes entrailles compatissent, si tes mains s’ouvrent, si malgré ton découragement tu te lèves, si tu refais confiance à autrui, si ton regard s’élargit, alors tu ressusciteras comme Jésus, comme toute vie bonne, comme la semence et la feuille au printemps.
Ecoute au plus profond de toi les paroles du ressuscité à Marie de Magdala : « Pourquoi pleures-tu, Marie ? Pourquoi cherches-tu le corps ? Pourquoi t’accroches-tu au passé ? Ne t’attache pas à la forme perdue. Découvre la vie, la présence nouvelle. Vis ». Écoute ce que dit le mystérieux pèlerin pascal au couple d’Emmaüs : « Pourquoi revenez-vous en arrière et cheminez-vous tête baissée ? » Pourquoi croyez-vous au pouvoir de Pilate, aux mensonges européens, à la dictature financière plus qu’au pouvoir de l’Esprit ? Pourquoi croyez-vous en la mort plus qu’en la vie ? Ouvrez votre esprit, votre cœur, vos mains. Croyez à la vie nouvelle. Construisez un futur nouveau. Ressuscitez chaque jour à « l’au-delà divin » qui est le cœur de « l’ici-bas ».

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Tenter de trouver avec notre prochain un terrain commun d’humanité
« Puissions-nous en ces moments entendre l’invitation de Dieu à prendre soin de ce monde, à en faire, là où nous vivons, un monde plus chaleureux, plus humain, plus fraternel. Un temps de rencontre, avec des proches, des amis : un moment pour prendre le temps de vivre quelque chose ensemble. Un moment pour être attentif aux autres, quels qu’ils soient. Un temps de partage de notre amitié, de notre joie. [...] Un temps de prière, aussi : attentifs à ce qui se passera dans notre monde à ce moment- là. Prions pour ceux qui en ont le plus besoin, pour la paix, pour un meilleur vivre-ensemble. »
Père Jacques Hamel
dans le bulletin paroissial de l’église Saint-Étienne, en juin, avant son assassinat
La compassion est en train de quitter notre monde

" "A ceux qui se demandent quel sorte de manque ronge silencieusement nos sociétés, il faut répondre : la compassion. Cette sollicitude spontanée que les bouddhistes appellent la maitrise et qui est assez proche, au fond, de l'agapê des chrétiens.
Aujourd'hui, on a beau prendre la réalité contemporaine par tous les bouts, une évidence crève les yeux : la compassion est en train de quitter notre monde. A petits pas. Insidieusement. Or, avec la compassion, c'est le bonheur de vivre qui s'en va. Disons même la gaieté.
Nos rires deviennent tristes. Notre sérieux est navrant. Nos prudences sont moroses. Nos "fêtes" sont sans lendemain. Nos plaisirs sont boulimiques et plutôt enfantins. Tout se passe comme si la frénésie jouisseuse de l'époque cachait une sécheresse de cœur et une stérilité de l'esprit.
La gaieté véritable, celle que nous sommes en train de perdre, c'est celle de l'aube, des printemps, des projets. Elle se caractérise par une impatience du lendemain, par des rêves de fondation, par des curiosités ou des colères véritables : celles qui nous "engagent".
Cette vitalité joyeuse ne doit pas être abandonnée à la contrebande des amuseurs médiatiques ou des clowns politiciens."

Paroles partagées par Jean-Claude Guillebaud en conférence en 2015 à Briec-de-l'Odet (29).