Color Selector

default niceblue intenseblue otherblue blue puregreen grassgreen green olive gold orange pink fuchsia violet red

Container Selector

Article

Pape François et patriarche Cyrille à Cuba : un rapprochement géopolitique ?

francois-cyrille-cubaLors de son voyage aux Amériques le pape François a rencontré le patriarche Cyrille de Moscou à Cuba le 12 février dernier. A défaut d’être historique, ce fut un événement de grande portée. Ces deux représentants des Eglises catholique et orthodoxe, séparées depuis le Grand schisme de 1054 ne s’étaient pas officiellement rencontrées depuis un millénaire. Il y avait bien eu en 1964, l’autre grande autorité de l’orthodoxie, le patriarche Athénagoras de Constantinople qui avait déjà donné l’accolade au pape Paul VI, à Jérusalem (ici se trouverait plutôt l’événement historique) , avant le revoir en 1967, à Istanbul, mais cette rencontre restait dans le cadre d’une dimension religieuse.

A cuba, elle existe aussi mais, quoiqu’en disent leurs Eglises respectives, la dimension géopolitique est tout aussi importante.
Cette explication géopolitique est « d’ailleurs la clé de ce rapprochement entre le Patriarcat russe et le Vatican, car la Russie cherche actuellement à sortir de son isolement diplomatique lié à son soutien du régime de Damas en Syrie. » Ce que confirme Mario Proietti le 12 février, dans le quotidien italien en ligne La Nuova Bussola. L’article évoque une rencontre sous « le patronage » du président russe Vladimir Poutine, « qui a non seulement autorisé cette rencontre, mais l’a voulue, dans la perspective des intérêts géopolitiques de la Russie ».

Ce n’est donc pas seulement une question d’œcuménisme, mais celle aussi d’un enjeu géopolitique, en particulier celui, crucial, pour les chrétiens d’Orient, en proie (comme dans d’autres régions du monde) à des persécutions violentes partout où ils sont confrontés au dévoiement de la religion musulmane par les islamistes.(Pakistan, Nigeria, l’ensemble du Moyen-Orient).

« Non plus en concurrence mais en frères »
A l’issue de leur conversation, en présence du président cubain Raul Castro, ils ont signé une déclaration commune préparée pendant des mois.
Celle-ci comporte donc un appel pressant en défense de ces chrétiens d’Orient, dont le sort actuel a été l’un des facteurs qui a poussé au rapprochement les responsables de ces deux Eglises chrétiennes qui se sont si longtemps tourné le dos. « Nous appelons la communauté internationale à des actions urgentes pour empêcher que se poursuive l’éviction des chrétiens du Proche-Orient » et à « mettre fin au terrorisme à l’aide d’actions communes, conjointes et coordonnées ».
Il en va donc également du maintien de la présence ce ces minorités dans ces pays: à travers violences menaces, vols, viols, guerre, ils fuient leurs maisons pour un simple question de survie.
Ce sont eux qui frappent aux portes de l’Europe.
« Leur sort oscille entre la guerre et la survie. Après l’exode massif auquel ils ont été durement contraints en Irak, c’est évidemment en Syrie que leur situation est actuellement la plus dramatique. » analyse l’hebdomadaire l’Express.
Dans les paragraphes 8, 9 et 10 de cette déclaration, le document décrit nettement la « persécution » que les chrétiens « subissent » : « nos frères et sœurs en Christ sont exterminés par familles, villes et villages entiers. Leurs églises sont détruites et pillées de façon barbare, leurs objets sacrés sont profanés, leurs monuments, détruits ».
Dans L’Express du 15 février, Christian Makarian souligne que « la fraternisation entre François et Cyrille ne vise pas l’unité des Eglises, mais la conjonction de leurs actions contre le péril djihadiste, qui vise la disparition de tous les chrétiens du Moyen-Orient ». Jean-François Colosimo considère que « pour François, il y a urgence pour les catholiques en Syrie et en Irak. Il parle d’œcuménisme du sang. Moscou et Rome font taire le passé pour faire front uni contre les nouvelles menaces, comme l’islamisme. »

Fin donc des anathèmes réciproques ?
En partie oui, mais il y a encore du chemin à faire sur la route de l’œcuménisme. Cette rencontre, aussi politique que religieuse, pourrait en être le chemin concret.
La déclaration ne nie pas le chemin encore à parcourir, avec les « divergences, héritées de nos ancêtres, … ». Le pape et le patriarche en appellent au témoignage, car « ce monde, dans lequel disparaissent progressivement les piliers spirituels de l’existence humaine, attend de nous un fort témoignage chrétien dans tous les domaines de la vie personnelle et sociale ».
Reste que ce qui peut réjouir dans ces retrouvailles peut provoquer la colère des gréco-catholiques en Ukraine qui craignent que le pape ne soit allé trop loin vis-à-vis de Moscou et interroger les autres églises orthodoxes. Oui, il y a encore du pain sur la planche ! … et un long chemin vers l’unité.

A l’issue de leur rencontre en privé, le pape François et le patriarche Cyrille ont donc signé un texte commun, « un texte dense et dont chaque mot a été soupesé, témoignant d’une convergence sur de nombreux points » ainsi que l’écrit Radio Vatican. Prenant acte du fait que « la civilisation humaine est entrée dans un moment de changement d’époque », François et Cyrille affirment, dans ce texte de trente paragraphes, leur volonté commune d’arriver à l’unité – « déterminés à entreprendre tout ce qui nécessaire pour surmonter les divergences historiques dont nous avons hérité » – et la nécessité, pour les catholiques et les orthodoxes, « d’apprendre à porter un témoignage unanime à la vérité dans les domaines où cela est possible et nécessaire ».

– Vous pouvez lire cette déclaration commune ici
– voir aussi l’hebdomadaire « Le Monde »:

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Tenter de trouver avec notre prochain un terrain commun d’humanité
« Puissions-nous en ces moments entendre l’invitation de Dieu à prendre soin de ce monde, à en faire, là où nous vivons, un monde plus chaleureux, plus humain, plus fraternel. Un temps de rencontre, avec des proches, des amis : un moment pour prendre le temps de vivre quelque chose ensemble. Un moment pour être attentif aux autres, quels qu’ils soient. Un temps de partage de notre amitié, de notre joie. [...] Un temps de prière, aussi : attentifs à ce qui se passera dans notre monde à ce moment- là. Prions pour ceux qui en ont le plus besoin, pour la paix, pour un meilleur vivre-ensemble. »
Père Jacques Hamel
dans le bulletin paroissial de l’église Saint-Étienne, en juin, avant son assassinat
La compassion est en train de quitter notre monde

" "A ceux qui se demandent quel sorte de manque ronge silencieusement nos sociétés, il faut répondre : la compassion. Cette sollicitude spontanée que les bouddhistes appellent la maitrise et qui est assez proche, au fond, de l'agapê des chrétiens.
Aujourd'hui, on a beau prendre la réalité contemporaine par tous les bouts, une évidence crève les yeux : la compassion est en train de quitter notre monde. A petits pas. Insidieusement. Or, avec la compassion, c'est le bonheur de vivre qui s'en va. Disons même la gaieté.
Nos rires deviennent tristes. Notre sérieux est navrant. Nos prudences sont moroses. Nos "fêtes" sont sans lendemain. Nos plaisirs sont boulimiques et plutôt enfantins. Tout se passe comme si la frénésie jouisseuse de l'époque cachait une sécheresse de cœur et une stérilité de l'esprit.
La gaieté véritable, celle que nous sommes en train de perdre, c'est celle de l'aube, des printemps, des projets. Elle se caractérise par une impatience du lendemain, par des rêves de fondation, par des curiosités ou des colères véritables : celles qui nous "engagent".
Cette vitalité joyeuse ne doit pas être abandonnée à la contrebande des amuseurs médiatiques ou des clowns politiciens."

Paroles partagées par Jean-Claude Guillebaud en conférence en 2015 à Briec-de-l'Odet (29).