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Stratégies des mouvements et projet d’émancipation

obligatoireVoici un intéressant article rédigé pour Le Monde Diplomatique-Brésil, le mardi 29 mars 2016, par Gustave Massiah (membre du Conseil international du Forum social mondial, ancien président du CRID, membre du Conseil scientifique d’Attac, auteur de Une stratégie altermondialiste (La Découverte, 2011)).
Il mérite que l’on prenne le temps de le lire pour comprendre le monde et voir pourquoi agir avec d’autres pour qu’advienne un monde autre que celui d’un capitalisme mortifère et inhumain. Face à l’offensive du néolibéralisme, il nous ouvre la perspective que les mouvements sociaux et citoyens peuvent être une réponse pour une stratégie nouvelle à l’échelle mondiale.Cette alternative ne se fera pas sans nous et ne tombera pas tout seul du ciel.
Nous vous le proposons pour comprendre, avec le regard de Massiah, les enjeux de notre époque. Epoque charnière aux confluents de multiples contradictions et ouverte à de multiples propositions pour son avenir. Laquelle semble prometteuse ? A quelles conditions ?

« Nous sommes dans une période de grands bouleversements et de très fortes incertitudes. Nous vivons probablement un changement de période dans lequel se crispent les anciennes tendances et s’amorcent de nouvelles. La citation de Gramsci est d’une grande actualité « le vieux monde se meurt ; le nouveau monde tarde à apparaître, et dans ce clair-obscur surgissent les monstres ». Il faut à la fois lutter contre les monstres et construire le nouveau monde. Il n’y a pas de fatalité, ni dans le succès, ni dans l’échec.

Sommaire
La situation mondiale semble désespérante
– Les contradictions majeures restent déterminantes
– L’hégémonie culturelle néolibérale a été imposée
– Les contre-tendances sont toujours vivaces
– Les nouvelles formes d’engagement dessinent des avenirs
– Une démarche stratégique ancrée sur un projet d’émancipation


Nous vous proposons les deux premiers articles de ce sommaire :


La situation mondiale semble désespérante
De 2008 à 2015, s’ouvre une nouvelle séquence dans l’histoire longue de la situation mondiale. Depuis 2011, des mouvements massifs, quasi insurrectionnels, témoignent de l’exaspération des peuples. Les révoltes des peuples répondent à la crise structurelle officiellement admise depuis 2008. Elles confirment l’épuisement de cette phase de la mondialisation capitaliste. Les inégalités sociales, le chômage, la précarisation ont fait baisser la consommation populaire et ouvert une crise de « surproduction ». Le recours au surendettement a trouvé ses limites ; par l’extension des marchés financiers dérivés, il a contaminé tous les marchés de valeurs. L’explosion des « subprimes » a marqué le passage de la dette des ménages à la dette des entreprises bancaires. Le sauvetage des banques par les États a ouvert la crise des dettes publiques. La réduction des déficits par les plans d’austérité est supposée permettre une sortie de crise qui sauvegarderait les profits et maintiendrait la prééminence du marché mondial des capitaux et les privilèges des actionnaires.
après les attentats de Bruxelles

après les attentats de Bruxelles

À partir de 2013, la situation semble s’être retournée. Les politiques dominantes, d’austérité et d’ajustement structurel, sont réaffirmées. L’arrogance néolibérale reprend le dessus. La déstabilisation, les guerres, les répressions violentes et l’instrumentalisation du terrorisme s’imposent dans toutes les régions. Des courants idéologiques réactionnaires et des populismes d’extrême droite sont de plus en plus actifs. Ils prennent des formes spécifiques comme le néo-conservatisme libertarien aux États-Unis, les extrêmes droites et les diverses formes de national-socialisme en Europe, l’extrémisme jihadiste armé, les dictatures et les monarchies pétrolières, l’hindouisme extrême, etc. Mais, dans le moyen terme, rien n’est joué.

Les contradictions majeures restent déterminantes
La situation ne se réduit pas à la montée des positions de droite ; elle est marquée par la permanence des contradictions. Ce que l’on a convenu d’appeler la crise s’approfondit. La dimension financière, la plus visible, est une conséquence qui se traduit dans les crises ouvertes alimentaires, énergétiques, climatiques, monétaires, etc. La crise structurelle articule cinq contradictions majeures [1] : économiques et sociales, avec les inégalités sociales et les discriminations ; écologiques avec la mise en danger de l’écosystème planétaire ; géopolitiques avec la fin de l’hégémonie des États-Unis, la crise du Japon et de l’Europe et la montée de nouvelles puissances ; idéologiques avec l’interpellation de la démocratie, les poussées xénophobes et racistes ; politiques avec la fusion du politique et du financier qui nourrit la méfiance par rapport au politique et abolit son autonomie.
Dans la construction de l’avenir, trois conceptions s’affrontent : le renforcement du néolibéralisme par la financiarisation de la nature ; un réaménagement du capitalisme, le Green New Deal, fondé sur une régulation publique et une modernisation sociale ; une rupture ouvrant sur une transition écologique, sociale et démocratique.
La première conception est celle de la financiarisation de la nature. Dans cette vision, la sortie de la crise passe par la recherche du « marché illimité » nécessaire à la croissance. Elle fonde l’élargissement du marché mondial, qualifié de marché vert, sur la financiarisation de la nature, la marchandisation du vivant et la généralisation des privatisations. Elle propose de marchandiser et de privatiser les services produits par la nature et de les confier aux grandes entreprises multinationales. Il s’agit alors de restreindre les références aux droits fondamentaux qui pourraient affaiblir la prééminence des marchés et de subordonner le droit international au droit des affaires. La deuxième conception est celle du Green New Deal, défendue par d’éminents économistes de l’establishment comme Joseph Stiglitz, Paul Krugman, Thomas Piketti et Amartya Sen, souvent qualifiés de néo-keynésiens. Elle part de l’« économie verte » qu’il s’agit de maîtriser. La proposition est celle d’un réaménagement en profondeur du capitalisme à partir d’une régulation publique et d’une redistribution des revenus. Elle est encore peu audible aujourd’hui car elle implique un affrontement avec la logique dominante, celle du marché mondial des capitaux, qui refuse les références keynésiennes et qui n’est pas prêt à accepter qu’une quelconque inflation vienne diminuer la revalorisation des profits. Il faut rappeler que le New Deal, adopté en 1933, n’a été appliqué avec succès qu’en 1945, après la Deuxième Guerre mondiale.
climatLa troisième conception est celle des mouvements sociaux et citoyens qui a été explicitée dans le processus des forums sociaux mondiaux. Ils préconisent une rupture, celle de la transition sociale, écologique et démocratique. Ils mettent en avant de nouvelles conceptions, de nouvelles manières de produire et de consommer. Citons les biens communs et les nouvelles formes de propriété, la lutte contre le patriarcat, le contrôle de la finance, la sortie du système de la dette, le buen vivir et la prospérité sans croissance, les relocalisations, la justice climatique, le refus de l’extractivisme, la réinvention de la démocratie, les responsabilités communes et différenciées, les services publics fondés sur les droits et la gratuité. Il s’agit de fonder l’organisation des sociétés et du monde sur l’accès aux droits pour tous et l’égalité des droits.
La stratégie des mouvements définit les alliances par rapport à ces avenirs possibles. L’urgence est de réunir tous ceux qui refusent la première conception celle de la financiarisation de la nature. D’autant que l’imposition du système dominant malgré l’épuisement du néolibéralisme porte les risques d’un néo-conservatisme de guerre. Dans la durée, et si le danger du néo-conservatisme de guerre peut être évité, la confrontation positive opposera les tenants du Green New Deal et ceux du dépassement du capitalisme. Les alliances concrètes dépendront des situations des pays et des grandes régions… »

lire l’article dans son intégralité ou le télécharger au format pdf – 4 pages-.
ou sur le site d’Attac

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Tenter de trouver avec notre prochain un terrain commun d’humanité
« Puissions-nous en ces moments entendre l’invitation de Dieu à prendre soin de ce monde, à en faire, là où nous vivons, un monde plus chaleureux, plus humain, plus fraternel. Un temps de rencontre, avec des proches, des amis : un moment pour prendre le temps de vivre quelque chose ensemble. Un moment pour être attentif aux autres, quels qu’ils soient. Un temps de partage de notre amitié, de notre joie. [...] Un temps de prière, aussi : attentifs à ce qui se passera dans notre monde à ce moment- là. Prions pour ceux qui en ont le plus besoin, pour la paix, pour un meilleur vivre-ensemble. »
Père Jacques Hamel
dans le bulletin paroissial de l’église Saint-Étienne, en juin, avant son assassinat
La compassion est en train de quitter notre monde

" "A ceux qui se demandent quel sorte de manque ronge silencieusement nos sociétés, il faut répondre : la compassion. Cette sollicitude spontanée que les bouddhistes appellent la maitrise et qui est assez proche, au fond, de l'agapê des chrétiens.
Aujourd'hui, on a beau prendre la réalité contemporaine par tous les bouts, une évidence crève les yeux : la compassion est en train de quitter notre monde. A petits pas. Insidieusement. Or, avec la compassion, c'est le bonheur de vivre qui s'en va. Disons même la gaieté.
Nos rires deviennent tristes. Notre sérieux est navrant. Nos prudences sont moroses. Nos "fêtes" sont sans lendemain. Nos plaisirs sont boulimiques et plutôt enfantins. Tout se passe comme si la frénésie jouisseuse de l'époque cachait une sécheresse de cœur et une stérilité de l'esprit.
La gaieté véritable, celle que nous sommes en train de perdre, c'est celle de l'aube, des printemps, des projets. Elle se caractérise par une impatience du lendemain, par des rêves de fondation, par des curiosités ou des colères véritables : celles qui nous "engagent".
Cette vitalité joyeuse ne doit pas être abandonnée à la contrebande des amuseurs médiatiques ou des clowns politiciens."

Paroles partagées par Jean-Claude Guillebaud en conférence en 2015 à Briec-de-l'Odet (29).